Après
vingt ans de guerre, le Roi Norodom Sihanouk a lancé en
1991, un appel à l’Unesco pour la sauvegarde du site
d’Angkor. En 1993, répondant à son appel,
le Japon et la France co-président à Tokyo la première
conférence intergouvernementale sur la sauvegarde du site
d’Angkor, site inscrit en 1992 sur la liste du patrimoine
mondial de l’Unesco.
Cette
première conférence intergouvernementale adopta
la « Déclaration de Tokyo », texte fondateur
qui définit l’esprit, le cadre et les modalités
de l’aide internationale.
- Prônait le recours à une forte mobilisation internationale.
- a mis en place le Comité International de Coordination
(CIC), co-piloté par la France et le Japon, et dont le
secrétariat est assuré par l’Unesco, instance
de proposition, d’évaluation, de suivi de l’aide
internationale
- Préconisait une approche globale et transdisciplinaire
des problèmes.
- Encourageait l’adoption de mesures législatives et
de préservation du site, ainsi que la mise en place d’un
programme général de formation des personnels cambodgiens
à tous les niveaux requis.
- Recommandait l’instauration d’un cadre institutionnel
de gestion par les autorités cambodgiennes .
- Proposait la tenue au bout de 10 ans, d’une deuxième
conférence intergouvernementale afin de dresser le bilan
de l’action du CIC.
La
majorité des objectifs et des défis cambodgiens
ont été relevés, dont la création
en 1995, de l’autorité APSARA, établissement
public en charge de la gestion du site.
La
première décennie (1993-2003) placée sous
le signe de la sauvegarde a ouvert la voie à une nouvelle
décennie 2003-2013 placée sous le signe du développement
durable et de la lutte contre la pauvreté. Une deuxième
conférence intergouvernementale à Paris (14 - 15
Novembre 2003) a donné lieu à l’adoption d’une
déclaration qui en porte le nom.
- a consacré le rôle éminent joué par
le CIC et a reconduit son action pour la prochaine décennie.
- a élargi son champ d’intervention à l’archéologie
(jusqu’alors centré sur la restauration et préservation
du patrimoine architectural) et a ouvert son expertise en matière
de développement durable, par la création d’un
Comité Technique Spécifique en son sein.
- a renforcé et élargi le mandat de l’autorité
APSARA pour répondre aux nouveaux objectifs de développement
durable fixés par - les partenaires internationaux.
- a préconisé la promotion d’un tourisme éthique
et durable en y associant les populations locales.
- a rappelé la nécessité d’assurer le
transfert de savoir-faire entre les experts internationaux et
leurs homologues cambodgiens et de coordonner l’ensemble
des initiatives dans le domaine de la formation sur le terrain.
L’action
de la France
L’action
de la France vise à doter le gouvernement cambodgien des
moyens juridiques, financiers, techniques et humains de gestion
et de contrôle de ce programme.
La
période 1992 - 1999
La
France a contribué :
- au dossier d’inscription du site d’Angkor sur la liste
du patrimoine mondial en 1992,
- à la mise en place d’une structure administrative
APSARA, en 1995,
- à l’assistance technique à la Conservation
d’Angkor depuis 1994 (dont l’inventaire des pièces),
- au déminage de la province de Siem Reap de 1992 à
1996,
- à la création d’une police du patrimoine en
1994,
- à la création en 1998 d’un atelier de restauration
de la statuaire lapidaire au Musée de Phnom-Penh,
- à la restauration avec le concours de l’EFEO, des
terrasses du Roi Lépreux et des éléphants
aujourd’hui achevée et du temple montagne du Baphuan
(en cours),
- au développement urbain et touristique assuré par
l’AFD (en cours).
La
période 2000 - 2009
L’intervention
de la France depuis l’année 2000 s’appuie sur
un engagement important dans le cadre d’un FSP « Site
d’Angkor - Patrimoine et développement » (montant
2 937 368 €) qui s’est achevé au 31 décembre
2004, ayant permis de fédérer les actions des ministères
des Affaires étrangères, de la Recherche, de la
Culture, et de l’Intérieur (poursuite de la restauration
du Baphuan, appui institutionnel à l’APSARA, carte
archéologique d’Angkor Thom, inventaire archéologique
des objets d’art Khmer, renforcement de la police du patrimoine).
La
continuité de cet engagement est assuré par la mise
en place en 2005 d’un second FSP, intitulé «
Patrimoine angkorien et développement durable » (montant
2 750 000 €) et d’une durée de 48 mois (2005-2009)
qui permettra la présentation et la mise en valeur du Baphuan,
la poursuite de l’appui institutionnel à l’APSARA,
la création d’un centre de formation spécialisé
de conservateurs du patrimoine, la modernisation du Musée
National de Phnom Penh et le développement de l’atelier
de restauration de ce Musée.
Angkor
à l'heure du développement (par
UNESCO)
Dix
ans après le début de la campagne de sauvegarde
d'Angkor (Cambodge), les problèmes les plus graves de ce
site emblématique de la culture khmer ont été
résolus grâce à l'effort de la communauté
internationale qui a investi plus de 50 millions de dollars, à
l'engagement des autorités du Royaume et au travail de
coordination mené par l'UNESCO.
Le
bilan de ces dix ans est éloquent : parmi la centaine de
projets de restauration et de développement menés
à bien, il faut citer la neutralisation de plus de 25 000
mines antipersonnel - dont 3 000 présentes dans les sites
archéologiques - et la destruction de 80 000 munitions
explosives. La création d'une police du patrimoine, ainsi
que l'inventaire minutieux des biens culturels et des campagnes
de sensibilisation pour éviter l'achat d'objets volés,
ont permis d'empêcher le pillage culturel dans le périmètre
protégé.
A
côté de la sauvegarde archéologique et architecturale
à laquelle continuent de participer des équipes
de France, du Japon, d'Allemagne, d'Italie, d'Inde et de Chine,
le moment est venu d'agir en faveur du développement, en
élargissant le processus avec des projets bénéficiant
directement à la population locale.
C'est
sur ces bases que la deuxième Conférence intergouvernementale
pour la sauvegarde et le développement durable d'Angkor
a réuni à Paris (14 et 15 novembre), à l'invitation
du gouvernement français, les membres du Comité
international de coordination (CIC)*, co-présidé
par la France et le Japon et dont l'UNESCO assure le secrétariat.
Comme
l'a souligné le Directeur général de l'UNESCO,
Koïchiro Matsuura : « Ce que nous a appris cette décennie
et tout ce qu'elle peut encore nous apprendre, devrait servir
de modèle pour la réhabilitation d'autres sites
historiques en situation de post-conflit - tel que Bamiyan en
Afghanistan ou l'héritage mésopotamien en Iraq -
qui ont enduré abandon, destructions gratuites et dévastations
de la guerre ».
Parmi
la quarantaine de projets que la Conférence a décidé
d'appuyer, on peut souligner la restauration du temple de Phnom
Bakheng (Xe siècle), le plus menacé d'Angkor, la
création d'un laboratoire central de conservation du patrimoine,
la signalétique des monuments, l'étude d'un schéma
directeur d'alimentation en eau potable de tous les habitants
de la zone, l'amélioration des conditions sanitaires et
la réhabilitation du pont proche du temple de Takeo sur
la rivière Siem Reap.
De
plus, pour améliorer les communications entre le site et
les autres provinces du pays, le gouvernement cambodgien s'est
engagé sur le long terme avec la construction d'un nouvel
aéroport, éloigné des sites archéologiques,
l'augmentation du trafic fluvial entre Phonm Penh et Battambang
et la réhabilitation de la route d'accès à
la Thaïlande en développant le réseau routier
provincial. On espère que cela contribuera à allonger
la durée moyenne de séjour des touristes en les
incitant à parcourir la région pour découvrir
ses multiples richesses.
Un
des défis à relever réside dans la gestion
du flux massif de visiteurs : plus de 300 000 en 2003 et en croissance
de près de 30 % par an. La Déclaration de Paris,
adoptée à l'issue de la Conférence (**),
reconnaît « la nécessité de développer
dans la zone de Siem Reap / Angkor, un tourisme éthique
et durable qui puisse devenir un outil de lutte contre la pauvreté
».
La
Déclaration souligne aussi « l'importance d'associer
les populations locales, dans cette zone et dans les environs
de Tonlé Sap, à la promotion de cette politique,
afin de mettre en valeur la diversité de leurs ressources
culturelles tant matérielles qu'immatérielles, et
leur faciliter l'accès d'une part à l'éducation
et à la formation, d'autre part à l'emploi et à
une vie culturelle enrichissante ».
Un
aspect original des projets internationaux du Programme Angkor
- tant les projets passés que ceux à venir - réside
dans le fait qu'ils incluent un volet formation, ce qui permet
au Cambodge de se doter d'un personnel national formé à
la gestion et à la conservation du patrimoine culturel,
personnel qui avait complètement disparu durant les sombres
années des khmers rouges. Les projets contribuent ainsi
à créer une génération d'architectes
et d'archéologues compétents qui vont prendre petit
à petit la relève des actions internationales.
Avec
le sauvetage d'Abou Simbel (Egypte), parfait exemple de mobilisation
de la communauté internationale lancée dans les
années 1960 sous l'égide de l'UNESCO, et les campagnes
en faveur de Boroboudur (Indonésie), Angkor illustre parfaitement
l'efficacité d'une initiative conjointe quand il s'agit
de préserver un site du patrimoine mondial.
Principal
point d'attraction du pays, Angkor a été la capitale
de l'empire khmer entre le IXème et le XVème siècle.
Véritable parc archéologique de 401 km2, il contient
une concentration exceptionnelle de monuments présentant
un intérêt religieux, historique, artistique ou humain.
Outre les temples d'Angkor Vat, mondialement connus, il existe
une quarantaine d'autres édifices d'époques et de
styles différents. Le tout s'inscrit dans un espace naturel
exceptionnel, offrant rivières, forêts et rizières.
De plus, Angkor est aussi un cadre de vie, habité par des
dizaines de milliers de personnes qui conservent des traditions
populaires et possèdent un riche patrimoine oral.
L'UNESCO
a consacré la valeur du site en 1992 en l'inscrivant de
façon urgente et simultanée sur la Liste du patrimoine
mondial et sur celle du patrimoine mondial en péril. Le
Comité du patrimoine mondial avait pris cette décision,
en renonçant à certaines de ses exigences habituelles,
« en réponse à une situation exceptionnelle
». Il était urgent, en tout premier lieu, de prendre
des mesures contre les mines (Il était impossible de circuler
librement sans courir un danger de mort). Le vol, le vandalisme,
le pillage et le trafic de biens culturels faisaient aussi des
ravages et causaient des dommages, parfois irréparables,
aux temples et monuments. Enfin, les années de guerre civile
et le régime des khmers rouges s'étaient traduits
par un abandon total.
Conscient
des dommages, le Roi Norodom Sihanouk avait lancé un appel
solennel à la communauté internationale. Cette dernière
avait répondu en organisant à Tokyo, en octobre
1993, une première Conférence intergouvernementale
pour la sauvegarde d'Angkor. La Déclaration de Tokyo, adoptée
à l'issue de cette Conférence, avait défini
l'esprit, le cadre et les modalités de l'action internationale.
La
Déclaration qui vient d'être adoptée à
Paris, avec toute une série de recommandations qui seront
mises en oeuvre sous la houlette de l'APSARA (Autorité
pour la Protection du Site et l'Aménagement de la Région
d'Angkor), créé en février 1995 par les autorités
cambodgiennes, constitue un pas décisif qui affirme que
le patrimoine culturel d'un peuple est une composante de son identité
et, en tant que tel, une clé pour sa reconstruction. Selon
les mots du Roi Norodom Sihanouk : « Angkor n'est plus en
péril, mais en voie de connaître la prospérité
».